[PODCAST] Les tendances cosmétiques

J'ai eu le plaisir d'échanger avec Monia Merabet, fondatrice de WeOutWow une agence en tendances et innovations spécialisée dans le domaine de la beauté. Pour retrouver son actualité c'est par ici

Alizée : Salut Monia, ça va bien ? 


Monia : Salut Alizée, oui et toi ?


Alizée : Ça va, merci. Je te remercie d'être là aujourd'hui pour qu'on puisse parler ensemble des tendances cosmétiques. Pour commencer, est-ce que tu peux te présenter ?


Monia : Oui, bien sûr. Alors je m'appelle Monia Merabet, Je suis la fondatrice de l'agence WeOutWow qui est une agence en tendances et innovations spécialisée dans le domaine de la beauté. Et avec mon associé qui, elle, est basée à Tokyo, on fait de la veille quotidienne pour essayer de dénicher les nouveaux produits, les nouveaux concepts, les nouveaux magasins qui peuvent sortir et apporter des choses innovantes. Et on fait tout ça en fait pour aider les marques à créer soit des nouveaux produits, soit des nouveaux concepts qui vont intéresser les clients. On s'appelle WeOutWow parce que, en anglais, to wow ça veut dire épater et on essaie d'aider les marques à épater leurs clients.


Alizée : Ha pas mal ! Et du coup, tu as toujours travaillé pour des cabinets de tendances ? D’où est ce que t'es venue l'idée de créer un cabinet ?


Monia : Alors en fait, c'est venu d'une discussion que j'ai eu avec mon associée, justement. On est déjà toutes les deux passionnées de beauté depuis longtemps et j'ai habité au Japon pendant trois ans. Et lorsque j'étais là bas, j'ai aidé au développement de deux marques de cosmétiques. Donc, c'est quelque chose qui me passionne depuis assez longtemps, et au fil de nos conversations, on s'est rendu compte qu'en fait il y avait assez peu d'informations sur ce qui se passait en termes de cosmétiques asiatiques en Europe et inversement. Du coup, on s'est dit qu'on allait essayer de créer quelque chose, notamment le book qu'on propose. L’idée c'est vraiment d'amener des informations d’Asie en Europe et inversement d'Europe vers l'Asie. Et donc on regarde beaucoup en Asie, pourquoi ? Parce que là-bas, ils ont vraiment une vision différente en termes de technologies et produits qui sont très, très innovants. Ils sortent des produits quasiment tous les deux ou trois mois. Ils sont très au fait de ce que les consommateurs attendent et ils devancent aussi les demandes des consommateurs.


Alizée : Est ce que la France aussi est un pays moteur d'innovation en cosmétique ?


Monia : Oui, complètement. Déjà, la France est un des plus gros pays au monde de cosmétiques. On est quand même les précurseurs avec la société la plus compétitive et la plus importante du marché qui est L'Oréal.


Alizée : On arrive quand même à tenir ! Même si la concurrence est rude, en France on est quand même bien loti. Pour parler des tendances actuelles, avec Juskin, je vais vraiment prôner l'efficacité long terme et pas une efficacité immédiate, instantanée. Est ce que c'est quelque chose que tu retrouves aujourd'hui au sein de différentes marques ? Est ce que c'est une tendance émergente d'aller vers une cosmétique long terme ?


Monia : Oui, complètement. C'est une tendance non seulement émergente mais une tendance qui va encore plus prendre de l'ampleur, je pense, avec les années à venir. Déjà l'environnement fait que malheureusement on va avoir des changements climatiques qui vont s'accentuer et qui vont être peut être de plus en plus difficile à vivre pour tout le monde. Où que l'on soit dans la planète. Donc, cette idée de vraiment trouver des produits qui vont nous protéger, nous aider à nous protéger de tous ces stress environnementaux qui peuvent exister, que ce soit le soleil, la pollution, la sécheresse et même les écrans de téléphones ou d'ordinateurs qui, au final, abîme aussi le capital cutané. Et après, à côté de ça, on a tout un mouvement, toujours dans cet esprit de cosmétique à long terme et d'être proactif, qui prône la réparation et la protection de la barrière cutanée.


Alizée : Et justement ça me fait rebondir sur le produit solaire. Donc la protection solaire quotidienne c’est quelque chose que tu retrouves au sein de certaines marques ? Le fait que la crème solaire, la protection solaire, soient vraiment à mettre dans la routine quotidienne ? 


Monia : On se rend compte que l'Asie est déjà bien plus avancée. C’est hors de question qu'une Japonaise ou une Coréenne sorte de chez elles sans avoir mis un écran total tous les jours. Pour des raisons de statut social mais il y a aussi un côté protection de la peau pour éviter les effets solaires qui créent des rides ou des taches pigmentaires. En France et en Europe on n'en est pas encore là. C'est à dire qu'il n'y a pas encore un gros pourcentage de femmes qui va se dire tous les jours, même si on est en hiver et que le ciel est couvert, je vais quand même mettre mon indice 50, mais je pense qu'on va en arriver là. D'ailleurs, tu demandais tout à l'heure si la France été précurseur dans le domaine cosmétique. Oui, parce que le premier produit solaire a été créé en France en 1935. Donc on est sur ce domaine on est déjà précurseur. C'est Eugène Schueller qui l'a créé, c’est le fondateur de la société L'Oréal. Et c'est seulement depuis les années 80 qu’on se rend compte que le soleil c'est aussi un facteur de vieillissement et que, du coup, les marques communiquent un peu plus là-dessus. Mais c'est une tendance qui est forte et il y a un potentiel énorme.


Alizée : Ma question suivante c’est par rapport à ce qui se passe aujourd'hui dans l'actualité avec le climat anxiogène que l'on a depuis quelques années, est ce que tu vois l'émergence de marques un peu plus holistiques ou on va un peu plus faire le lien entre l'extérieur et l'intérieur, avec un bien être intérieur aussi important que le bien être extérieur dans sa vie quotidienne. Est ce que tu vois apparaître des marques un peu plus holistiques ? On va dire où l’on va vraiment faire attention à ce que l’on ressent à l'intérieur.


Monia : Oui, complètement. Ça aussi, c'est vraiment une grande tendance. Parce qu'en fait, on se rend compte que la frontière entre la beauté et le bien être, elle est de plus en plus fine et qu'on veut se faire du bien pour être belle finalement. Le dicton qu'on prenait avant, il faut souffrir pour être belle, maintenant, c'est complètement l'inverse, car pour être belle, il faut être bien, équilibrée et pas être pas stressée ou anxieuse. Donc il y a vraiment tout cet aspect, on va dire presque psychologique qui vient intervenir.



Alizée : Est ce que tu peux nous parler un petit peu des tendances que tu vois apparaître dans les boutiques ?


Monia : Oui, alors je dirais que dans le retail, on voit différentes tendances. Il y a ce côté tech, de plus en plus de marques maintenant proposent un lien entre physique et digital. C'est à dire que quand on va dans un magasin maintenant, c'est rare de pas pouvoir trouver un gadget qui va nous permettre d'analyser notre peau ou de scanner avec un QR code un produit pour avoir plus d'informations. C'est quelque chose qui est très présent en magasin. Et il y a cette envie aussi de faire que les consommateurs viennent dans les magasins, pas seulement pour voir ou toucher des produits, mais aussi pour vivre des expériences. Et ça, ça se retrouve à travers l'architecture d'intérieur, par exemple, avec des magasins qui sont complètement incroyables en termes de design. Je pense notamment à un grand magasin qui est situé à Madrid, qui s'appelle WOW et qui a été inauguré l'année dernière. En fait, a chaque étage on a l'impression d'être dans un musée d'art tout est super beau, super instagramable. Ils ont vraiment fait ça pour que le client vienne, prenne des photos, fasse au passage la pub du magasin et découvre des produits aussi. Et le troisième point que je trouve intéressant dans le retail  c'est le côté éducation. Il y a énormément de marques qui proposent en magasin des ateliers, des workshops, qui proposent vraiment de l'information sur soit des sujets généraux comme l'environnement, et pourquoi c'est important de recycler ses produits et cetera, ou des choses un peu plus personnelles comme la méditation ou le bien être ou ce genre de chose.


Alizée : Tu me parlais d'une boutique où tu avais différents étages et tu pouvais méditer, te faire masser, je ne sais plus où c’est…


Monia : Oui à Séoul. En fait, c'est la marque Sulwhasoo Donc c’est une marque qui existe depuis très longtemps et ils ont ouvert un flagship je crois que c'était en 2019 ou 2020. Et voilà, il y a six étages et à chaque étage, en fait, c'est un concept différent. Donc on a un étage éducation, où ils expliquent vraiment quels sont les ingrédients utilisés, quelle est l'histoire de la marque. On a un étage où on peut faire des soins classiques, donc massages ou soins du visage. On a un étage, où on peut faire des soins plus physiques : il y a du yoga et de la méditation. Et puis, bien sûr, il y a une terrasse où on peut prendre son café. Il y a un étage qui est réservé aux VIP. Donc c'est vraiment en fait un magasin où on vient pour passer plusieurs heures, pas juste 20 minutes pour prendre un produit, et encore une fois, on y vient pour découvrir plus que des produits.


Alizée : C'est vraiment vivre une expérience. Et quand tu achètes un produit, tu n'achètes pas que la marque, tu achètes aussi un mode de vie entre guillemets, un lifestyle.


Monia : Oui, c'est ça. Et puis en plus, je trouve que même pour les marques, il y a un côté vraiment important en fait de transmettre autre chose que juste un produit de beauté. Parce que la beauté ce n'est pas que de se maquiller ou se faire un soin. La beauté c'est quelque chose qui est très important dans notre société, qu'on l'accepte ou qu'on l'accepte pas. Mais on veut vraiment montrer qu'il y a un petit peu plus de profondeur dans la beauté que ce qu’on a l'habitude de penser.


Alizée : Est ce qu'aujourd'hui tu as vu apparaître d'autres packaging, des innovations ou des nouveaux concepts ?


Monia : Alors, en terme de packaging, la plus grande tendance qu'on va avoir, c'est celle du développement durable. Le deuxième point qui est aussi impacté par ce côté développement durable, c'est tous les produits qui sont rechargeables et là, on voit beaucoup d'innovations, notamment dans les marques, que ce soit de luxe ou autre, de produits qui sont presque devenus comme des accessoires de mode. Quand on voit par exemple les rouge à lèvres Hermès qui sont rechargeables et qui sont vraiment très beaux, donc on a vraiment envie de les garder et de les avoir dans son sac.


Alizée : Oui, en fait, j'ai l'impression qu'on va vraiment vers une consommation multifonctionnelle entre guillemets. Tu vas aller en magasin pour acheter un produit, mais tu va aussi faire un cours de yoga, ou tu vas venir pour t’inspirer ou pour faire un bilan de peau avec un scan de peau. Ou alors, quand tu vas acheter un produit derrière tu peux  le garder comme décoration pour chez toi ou tu peux le planter. Donc c'est vrai que maintenant on va plus loin en fait. On ne vend pas juste un produit mais tu as toute une philosophie. C'est vraiment très très chouette.


Monia : Oui, complètement. En fait, je pense que les consommateurs veulent consommer intelligemment, entre guillemets et surtout avoir des produits qui ne s'arrêtent pas juste au produit en lui-même mais qui est quand même derrière, avant et après, dans une démarche intéressante. Et c'est comme si la consommation c'était un peu un moyen de montrer nos valeurs, de montrer ce qu'on veut faire pour la société. Et je pense que la nouvelle génération ne fera pas autrement.


Alizée : Oui, c'est ça. Si tu veux aujourd'hui innover, il faut vraiment travailler le pourquoi. Pourquoi tu vends ce produit? Est ce qu'il a une utilité long terme ? On va plus acheter uniquement pour se faire plaisir. Il y aura toujours ça, mais ce qui va donner le côté plaisir, c'est le pourquoi tu vas acheter ça, quelle est la philosophie derrière et l'utilité du produit dans sa globalité.


Monia : Oui, complètement. Et c'est pour ça qu'on voit beaucoup de backlash sur les marques qui font du greenwashing. Des marques qui prétendent des choses qui ne sont pas vraies. Ça, c'est vraiment la chose à éviter au maximum parce que ça ne passe plus du tout, avant on pouvait dire des choses qui n'étaient pas vérifiées et pas vérifiables. Ça s'est fini. Il faut vraiment être droit dans ses bottes quand on prône quelque chose.


Alizée : Je sais que tu parlais de time to shift. Donc est ce que tu peux développer cette tendance émergente.


Monia : Oui, alors time to shift. En fait ça fait référence au shifting, donc c'est une méthode qu'on peut retrouver sur YouTube ou TikTok qui explique comment faire pour shifter de dimension grâce à des techniques soit de méditation, de relaxation, d'écriture même. Ils expliquent que voilà, ils arrivent en se relaxant à vivre dans une autre dimension. Et bien sûr, ce sont des dimensions qui sont en général beaucoup plus agréables où ils n’ont pas les soucis qu’ils ont dans la réalité. Et ça en fait, ça se retrouve aussi dans les cosmétiques, dans le sens où les jeunes ne veulent plus être limités par la réalité qu’on peut vivre tous les jours et sont beaucoup plus intéressés par des produits qui sont très fun pour justement sortir un peu de ce carcan de la beauté habituelle. Et il y a beaucoup de marques, comme la marque de la MakeUp artiste de Euphoria, la série américaine, avec des maquillages très extravagants et qui sont très populaires auprès des jeunes. Donc on a vraiment cette idée qu’on n'a plus besoin de se conformer vraiment à la réalité et on peut innover et être créatif avec son maquillage aussi.


Alizée : On parle beaucoup du Metavers. Est ce que ça se retrouve au sein des marques de cosmétiques ?


Monia : Oui, complètement. Donc le Metavers pour ceux qui ne connaissent pas vraiment ce que c'est, c'est en fait un monde virtuel dans lequel on peut avoir un avatar et dans lequel on peut vraiment interagir avec soit d'autres personnes, qui sont en même temps que vous dans ce monde virtuel, soit avec des marques. Et pour l'instant, c’est encore assez balbutiant, ça fait plusieurs années que ça existe bien sûr, mais on en est toujours, on va dire à un niveau assez limité, notamment en terme de design. Parce que c'est vrai que pour l'instant, quand on va sur une plateforme Metavers, les avatars, ils ne font pas trop rêver non plus. C'est pas encore vraiment le Metavers comme on se l'imagine où on va avoir l'impression qu’on ne saura plus différencier la réalité de la fiction, on n'en est pas encore là. Et malgré ça, il y a quand même beaucoup de marques qui sont déjà sur ces plateformes. Il y a beaucoup de marques dans la mode notamment qui créent des vêtements digitaux pour ces avatars. Pour la cosmétique, c'est un petit peu plus difficile parce qu'il y a vraiment un côté très tactile dans les cosmétiques qui est difficile à retranscrire en digital. Mais il y a quand même beaucoup d'innovations et beaucoup de marques qui se lancent. Je pense notamment à Charlotte Tilbury qui elle a carrément créé son propre Metavers qui ressemble à un magasin. On peut entrer en tant que consommateur dans cet environnement digital. On peut parler avec une conseillère de vente, on peut découvrir les produits, on peut tester les produits aussi, donc c'est vraiment quelque chose d'assez complet.


Alizée : Mais c'est plutôt du maquillage en fait ? Tu peux tester parce que tu as différents filtres qui permettent d'avoir différentes couleurs de rouge à lèvres par exemple ?


Monia : Oui, exactement. Pour l'instant, c'est vrai que c'est assez limité aux cosmétiques de couleurs.


Alizée : Merci beaucoup pour ce partage. Je vous souhaite à tous une belle journée et puis Monia… à bientôt !


Monia : A bientôt, merci beaucoup Alizée ! Bonne journée.



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